C’est en lisant la Clique du Plateau (toujours sarcastique et baveux) que la chose m’est apparue tellement évidente…
Vendredi dernier, le journaliste et chroniqueur de La Presse y allait de son dernier texte pour ce quotidien majeur qu’il alimente depuis pas moins de 37 années. Rappels de ses grandes passions, de ses grands moments, de ses grandes émotions et remerciements à tous et toutes, y compris ses lecteurs et même les féfans dont il se moque allègrement depuis plusieurs années.
Il y a une quinzaine d’années (ou 20 ?), devenu superstar du journalisme sportif, Réjean Tremblay a pris une tangente télé en écrivant des séries télé qui ont connu un succès majeur et des cotes d’écoute phénoménales. Je pense entre notamment à Lance et compte et Scoop dans lesquelles il scénarisait des histoires à partir de ses connaissances et expériences des milieux qu’il fréquentait. Succès total et fric correspondant. S’en est suivie une série de collaborations ailleurs, notamment à la radio et sur plusieurs scènes populaires. Et parallèlement, une montée dans la stratosphère médiatique sportive avec des entrées dans certains cercles financiers et décisionnels très très élitiques. Notamment cette belle amitié avec Me Marcel Aubut, celui qui a vendu et sorti les Nordiques de la ville de Québec et avec lequel Réjean se tape régulièrement de belles et longues ballades en Harley-Davidson.
Cette montée « sociale » ne s’est pas faite sans troubler et déranger plusieurs collègues journalistes qui, par jalousie ou forte insistance sur l’indépendance totale requise pour exercer leur métier, ont alimenté et colporté des commentaires « off the track » pour miner la crédibilité du chroniqueur superstar. Même Foglia nous envoyait dans ses chroniques, pas souvent dois-je préciser, des petites phrases se terminant avec des points de suspension … Comme ce petit mot ce matin : « Hé Réjean, je t'embrasse pareil, vieux Judas. Amuse-toi bien. ».
Réjean Tremblay nous informe donc qu’il va continuer à vivre malgré tout avec des projets d’écriture, notamment pour des organismes dédiés à la pauvreté en Afrique ou ailleurs. Questionné sur la possibilité de joindre l’empire Québécor du Journal de Montréal qu’il a si souvent abaissé et regardé de haut en vantant La Presse le groupe qu’il vient de quitter, il devient évasif et semble au-dessus de la chose.
Ce que le court texte de La Clique m’a exposé en pleine face, c’est tout simplement que La Presse, un journal quotidien dont il fut un rouage très important pendant tellement d’années, n’a que simplement publié son dernier article. Rien d’autre. Pas d’hommage, pas de reconnaissance pour services rendus, pas de résumé de carrière, ni chronologie de son séjour, ni rappel de ses grands « scoops », peu de témoignage des collègues qu’il a cotoyés pendant toutes ces années, bref … quasiment rien. Salut, bonsoir !
Cette indifférence de ses employeurs depuis 37 ans me semble révélatrice du très probable passage de Réjean Tremblay chez le compétiteur. Et ça me désole. Le fric ne peut pas tout acheter. Déjà que la fortune du scribe et auteur le met à l’abri pour le restant de ses jours, l’hypothétique transfert chez ce compétiteur tellement acharné à bafouer les droits et acquis de ses employé(e)s « ordinaires », ça me lève le cœur.
Réjean Tremblay n’est pas un idiot. Il est même brillant. Assez pour prévoir que cette putasserie soulèvera un tollé dans les médias et dans le cœur de plusieurs lecteurs qui le suivent depuis si longtemps. Est-ce que le fric peut cautionner une telle hérésie intellectuelle et assombrir une belle et longue carrière bâtie avec un exceptionnel talent de communicateur ?
Les mois qui viennent vont répondre à cette interrogation …