Mais oui ! Dans une presqu’autre vie, j’étais séminariste chez les Pères Montfortins à Papineauville dans l’Outaouais. Les deux années précédant l’Expo 67.
Même si mon patelin (Thurso) n’était qu’à 25 km, j’y étais pensionnaire, tout comme les 250 autres jeunots isolés de la civilisation du village voisin.
Les séjours à la maison ? Quatre jours à la Toussaint, deux semaines pour les Fêtes, cinq jours pour les Pâques et les deux mois des vacances d’été.
Levée des corps à 5h 45, messe matinale tous les jours, études (le cours classique bien sûr), chapelet collectif en après-midi, prières en soirée avant de regagner le dortoir à 21h.
Tous autant que nous étions, nous soupçonnions chaque Père, qu’il soit prof ou administrateur, d’être homo ou fif, l’expression gay n’existant pas à l’époque. Nous étions tous sur nos gardes et fort vigilants.
Chaque séminariste devait choisir un Père qui ferait office de «directeur de conscience». Ce titre n’est pas une blague mais rigoureusement authentique. Trois ou quatre fois par année, il nous fallait rencontrer ce fameux Père pour discuter de notre avenir et autres préoccupations.
Vous ne le croirez pas, mais ces discussions se déroulaient . . . dans la chambre du Père, une minuscule pièce d’environ 15 pieds par 9 pieds. Jamais n’y ai-je connu d’incidents déplacés ou d’allusions malveillantes avec le Père Jacques qui se voulait également mon prof de latin.
Étrangement, aucun scandale ni rumeur fondée n’ont fait surface au cours des deux années que j’ai passées dans cette geôle. Que des suppositions et potins sans conséquence.
Dans les faits, j’y suis resté un peu moins de deux années. Détestant cet internement et ne parvenant pas à convaincre mes parents de m’en retirer, j’ai amorcé une séquence de cancre et de délinquant. Me suis même enfui, la nuit aidant, sur le pouce pour retourner chez nous et devoir y revenir, penaud, le lendemain.
Nous avions des classes toute la journée du samedi, question de compenser pour les après-midi du mardi et du jeudi qui étaient consacrées aux sports.
Ce samedi de la fin avril 67, lorsque le Père directeur m’a fait sortir de la classe pour m’aviser que mon véritable père m’attendait dans le hall d’entrée, j’étais on ne peut plus perplexe : les visites n'étaient pas permises le samedi.
Je me revois encore inquiet, m’approchant de papa qui affiche un air solennel.
- Es-tu tanné d’être icitte mon Bé ?
- Ça fait des mois que j’vous l’dis !
- Ramasse tes affaires, tu t’en r’viens à la maison !
Voilà ! Je viens de vous confier un moment exceptionnellement radieux de mon existence : l’amour et la compréhension de mon père . . .
Même si mon patelin (Thurso) n’était qu’à 25 km, j’y étais pensionnaire, tout comme les 250 autres jeunots isolés de la civilisation du village voisin.
Les séjours à la maison ? Quatre jours à la Toussaint, deux semaines pour les Fêtes, cinq jours pour les Pâques et les deux mois des vacances d’été.
Levée des corps à 5h 45, messe matinale tous les jours, études (le cours classique bien sûr), chapelet collectif en après-midi, prières en soirée avant de regagner le dortoir à 21h.
Tous autant que nous étions, nous soupçonnions chaque Père, qu’il soit prof ou administrateur, d’être homo ou fif, l’expression gay n’existant pas à l’époque. Nous étions tous sur nos gardes et fort vigilants.
Chaque séminariste devait choisir un Père qui ferait office de «directeur de conscience». Ce titre n’est pas une blague mais rigoureusement authentique. Trois ou quatre fois par année, il nous fallait rencontrer ce fameux Père pour discuter de notre avenir et autres préoccupations.
Vous ne le croirez pas, mais ces discussions se déroulaient . . . dans la chambre du Père, une minuscule pièce d’environ 15 pieds par 9 pieds. Jamais n’y ai-je connu d’incidents déplacés ou d’allusions malveillantes avec le Père Jacques qui se voulait également mon prof de latin.
Étrangement, aucun scandale ni rumeur fondée n’ont fait surface au cours des deux années que j’ai passées dans cette geôle. Que des suppositions et potins sans conséquence.
Dans les faits, j’y suis resté un peu moins de deux années. Détestant cet internement et ne parvenant pas à convaincre mes parents de m’en retirer, j’ai amorcé une séquence de cancre et de délinquant. Me suis même enfui, la nuit aidant, sur le pouce pour retourner chez nous et devoir y revenir, penaud, le lendemain.
Nous avions des classes toute la journée du samedi, question de compenser pour les après-midi du mardi et du jeudi qui étaient consacrées aux sports.
Ce samedi de la fin avril 67, lorsque le Père directeur m’a fait sortir de la classe pour m’aviser que mon véritable père m’attendait dans le hall d’entrée, j’étais on ne peut plus perplexe : les visites n'étaient pas permises le samedi.
Je me revois encore inquiet, m’approchant de papa qui affiche un air solennel.
- Es-tu tanné d’être icitte mon Bé ?
- Ça fait des mois que j’vous l’dis !
- Ramasse tes affaires, tu t’en r’viens à la maison !
Voilà ! Je viens de vous confier un moment exceptionnellement radieux de mon existence : l’amour et la compréhension de mon père . . .
5 commentaires:
J'ai le sourire plein la face!
Voilà une tranche de vie si bien racontée qu'elle nous fait vivre plein d'affaires nous autres aussi. J'ai tellement mieux respiré moi-même quand ton père est venu te chercher... Non mais on étouffait là-dedans?
Un « directeur de conscience », ça faisait longtemps que j'avais pas entendu parler de ça!
Maintenant, on appelle ça un vieux chum pis on va prendre une bière avec...
:)
WOW! Superbe!
Eh que je te comprends Croco... Presque la même situation, sans délivrance cependant pour moi... Moi, c'était quelques années plus tard et ce n'était pas un "directeur de conscience", mais bien un "objecteur de conscience"! Comme qui, les accomodements du temps n'étaient pas que raisonnables.
Ça c'est un beau moment dans une vie!
Vous n'aviez entendu parler de rien concernant l'homosexualité. Même si vos colègues auraient été victimes, vous n'auriez entendu parler de rien.
Le drame est là.
Accent Grave
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